Les sapeurs-pompiers
J’ai eu l’envie d’écrire un article sur un sujet que je vois peu abordé et qui me touche indirectement – par le lien affectif dirons-nous ❤️ mais amical et éthique aussi. En 2023, la France comptait 256 400 sapeurs-pompiers: Les sapeurs-pompiers, c’est plus de 4 millions d’interventions par an, soit une toutes les 6,6 secondes. En 2023, c’était 3,8 millions de victimes prises en charge. Sources Ministère de l’intérieur: 2023 / Sécurité civile / Statistiques / Publications – Ministère de l’Intérieur Mais, d’après les syndicats français, c’est également une espérance de vie réduite de 7 années. Un métier dont la nécessité ne fait pas débat. Et la pénibilité non plus… Etre sapeur-pompier, c’est être exposé au : Wiitavaara et al., 2007; Hignett et al., 2007 + ILO, 2009a, 2009b Un autre risque très présent mais peu connu: l’exposition aux polluants Au cours de leurs missions, les pompiers sont régulièrement exposés aux fumées, à la suies, aux cendres et microparticules provenant de la combustion de divers matériaux, des mousses anti-incendie ou des retardateurs de flammes. Leurs voies respiratoires sont protégées pendant les interventions sauf lors des feux de forêt où le matériel nécessaire est jugé trop lourd. Il faut savoir que les hydrocarbures aromatiques polycycliques (HAP), les PFAS et autres substances nocives passent également facilement par la peau dont les pores sont dilatés sous l’effet de la chaleur. Si certains efforts sont fournis, comme en Belgique par exemple, sans mesures adaptées de désinfection des tenues et des véhicules, les polluants sont retrouvés sur les tenues des pompiers, dans les véhicules professionnels mais personnels aussi et jusque dans leur domicile. Publication du CIRC et reconnaissance du risque cancérogène En 2022, le CIRC (Centre International de Recherche sur le Cancer), agence de l’OMS, a publié les résultats d’une étude menée par une vingtaine de chercheurs de huit pays différents. Cette agence a, pour la première fois, classé le métier de sapeur-pompier comme « cancérogène pour l’homme ». Une reconnaissance officielle des risques de cancer valable pour les hommes comme pour les femmes, pour les professionnels comme les volontaires, en activité comme retraités. Monographie Vol. 132 : Cancérogénicité de l’exposition professionnelle en tant que pompier • Cancer Environnement Ce rapport nous informe que cinq types de cancer peuvent être liés de manière « crédible » au métier de sapeur-pompier : Il révèlent surtout une surincidence de deux autres cancers mésothéliomes et du cancer de la vessie en lien avec l’exposition aux fumées toxiques, aux HAP, au PFAS et autres substances nocives présentes dans les matériaux de construction, les mousses anti-incendie ou les retardateurs de flamme: Le risque de mésothéliome est 58 % plus élevé chez les pompiers que dans la population générale. Le risque de souffrir d’un cancer de la vessie est, lui, supérieur de 16%. Selon l’International Association of Fire Fighter, les cancers sont la première cause de mortalité chez les pompiers. Pourquoi je m’y intéresse? Pourquoi j’en parle? Je m’y intéresse parce que j’ai des pompiers dans mon entourage amical et aussi que l’un d’eux partage mon quotidien (et quel soutien 🥰) mais le lien avec mon métier est évident à faire. Les cancers, en particulier ceux de la vessie ou de la prostate, ainsi que leurs traitements peuvent avoir des répercussions importantes, parfois définitives, sur la vie sexuelle et affective des personnes concernées. Or, dans ma pratique, je constate que l’impact sur la sexualité est trop peu abordé dans le cadre du parcours de soin alors même qu’il peut affecter profondément l’estime de soi, la qualité de vie, la santé mentale – et donc la santé globale – des personnes touchées. Ce manque de prise en charge des problématiques sexuelles relève généralement d’un manque de temps mais aussi d’une question de pudeur des soignants et/ou des patients. Et ce n’est sans doute pas dans la sphère professionnels que les pompiers pourront trouver les ressources nécessaires pour surmonter ces difficultés. Leur devise annonce la couleur « Sa mission de préserver la vie des hommes et de leurs biens impose un certain esprit de sacrifice qui est contenu dans la devise . Sauver ou périr Savoir accepter les risques du métier renvoie également à une éthique de vie guidée par «Le courage et le dévouement». Pompiers.fr, le site des sapeurs-pompiers de France La culture professionnelle des pompiers est forte. Les notions de performance, d’engagement, de disponibilité et de sacrifice y sont encore très ancrées. Ce milieu tend à se féminiser (22 % de femmes coté civils) mais reste encore majoritairement masculin. La peur de la stigmatisation, la peur de faire part de sa vulnérabilité qui pourrait être jugée comme une faiblesse, peut enfermer les pompiers dans un silence forcé et les priver d’une prise en charge adaptée. Cette problématique concerne sans doute autant les femmes que les hommes. L’intervention d’une personne extérieure au suivi médical et à la sphère professionnelle me semble particulièrement pertinente. Ce sujet me porte et me passionne. Par Amour bien sûr ! mais aussi parce que j’y vois une injustice difficile à comprendre. Reste à découvrir si un tel projet peut être mis en place… En attendant, je vous invite à regarder le documentaire « consommables : de la passion au poison » écrit par le Syndicat Autonome SPP-PATS 06 et réalisé par Israël Kamkhadji. Je me spécialise, entre autres, en sexo-oncologie. Pourquoi consulter ? – Audrey Lahaye